Arrivée des véhicules autonomes : vers la fin de la voiture individuelle ?

Les nouvelles technologies modifient pas à pas notre monde.  Si tous les secteurs sont touchés, celui des transports est l’un des plus impactés par ces questionnements et ces avancées. Parmi les évolutions programmées, l’arrivée sur le marché de véhicules autonomes, accompagnée d’un changement radical de notre rapport à Titine.

Petit préambule pour les néophytes, un véhicule autonome (VA) dispose d’un système de pilotage automatique, doté d’un programme d’intelligence artificielle qui permet au véhicule de circuler sans intervention humaine et dans des conditions de circulation réelles. De nombreux constructeurs automobiles et entreprises high-tech se sont lancés sur le remplacement, par un logiciel, de la conduite humaine[1]. Il s’agit maintenant de réfléchir aux usages et développements possibles.

Véhicule autonome, à partager

En plus de cette volonté de délivrer l’homme de son statut de conducteur, les chercheurs posent la question de l’intérêt d’une voiture personnelle. L’économie de partage, covoiturage et autre location entre particuliers, nous montrent une voie parallèle, que la technologie du VA permettrait d’exploiter.

Tout part de ces trois constats, expliqués par Thomas Vöge, expert en transports publics durables de l’ITF (Forum International des Transports) dans une interview pour le magazine Bougeons demain[2] : nos voitures restent à l’arrêt 96% du temps, et 75% des voitures ne comptent qu’une personne ; les villes sont encombrées et polluées ; l’achat et l’entretien d’un véhicule coûtent cher.

Le VA ne doit donc pas fonctionner de manière individuelle. Si chaque usager achète son propre VA, le nombre de véhicules en circulation ne réduira pas et ces trois problèmes ne seront pas résolus. Pour Robin Chase, co-fondatrice de la société d’autopartage Zipcar, si nous remplacions les véhicules individuels autonomes par des VAPE (véhicules autonomes partagés et électriques) nous aurions besoin de seulement 3 à 10% des véhicules que nous utilisons aujourd’hui en ville. Et ce sont les VAPE qui vont contribuer à changer positivement le monde de demain[3].

On pourrait alors se tourner vers une mobilité partagée, avec moins de véhicules en circulation et des transports publics et urbains améliorés. Pour ce faire, il est important de construire des offres adaptées, accessibles aux citoyens et durables.

Quand la science-fiction devient réalité

Imaginez un parc automobile 100% autonome avec des véhicules durables et propres. Vous êtes lorientais, vous devez vous rendre au travail et trois solutions s’offrent à vous :

  1. Réserver une course via votre smartphone en véhicule autonome privé (€€€). Temps d’attente depuis chez vous : 5min
  2. Réserver une course via votre smartphone en véhicule partagé (€€). Temps d’attente depuis chez vous : 10min
  3. Rejoindre un arrêt de bus à quelques pas de chez vous et emprunter un transport collectif (€). Temps d’attente à l’arrêt : 10min

L’offre s’adresse à tous et les publics traditionnellement exclus (personnes à mobilité réduite, isolées, enfants ..) peuvent désormais accéder à la mobilité.

En outre, le paysage urbain est transformé ; les anciens parkings ont laissé la place à des jardins ou pistes cyclables. Poursuivons notre incursion dans le futur. En rentrant chez vous, vous décidez de commander un produit fabriqué à plus de 1500 Km de chez vous. La livraison est assurée désormais en 24h et non plus 2-3 jours. Le service de livraison de marchandises s’affranchissant des législations du travail, les véhicules sans conducteurs peuvent rouler 7j/7, 24h/24.

Enfin, vous décidez de réserver avec votre conjoint(e), votre VA pour partir en week-end à l’autre bout de la France. Pour gagner du temps, vous choisissez l’option voiture-couchette et vous effectuez le trajet de nuit[4]. L’idée est alléchante, mais est-ce vraiment réalisable ? Quels sont les risques ? Quelles seraient les conséquences sur les autres secteurs ?

Fin de la propriété individuelle et exigences technologiques

Ce futur « autonome » ne peut fonctionner que dans la mesure où nous acceptons la fin de la propriété individuelle et ses conséquences. Un postulat qui n’est pas si évident. N’oublions pas le symbole que revêt la voiture dans notre société. Depuis le début du XIXe siècle, elle est synonyme de liberté et de réussite sociale[5]. Les Français sont-ils prêts à ne plus posséder de véhicule ?

L’Etat devrait également réfléchir à une modification totale de la tarification, législation et signalétique routière. Tom Vögue nous rappelle que les recettes fiscales liées au carburant constituent en France 3% du PIB, c’est la troisième source de revenu après la TVA et l’impôt sur le revenu. Il faudrait ainsi trouver des solutions pour compenser les pertes liées au carburant.

En outre, la problématique du besoin énergétique de ces véhicules interroge. L’idéal serait de construire des véhicules qui circulent à l’énergie renouvelable. Car, si ces derniers utilisent de l’électricité, l’Etat serait en incapacité de répondre à la demande croissante des usagers, les installations électriques actuelles ne permettant pas d’approvisionner un parc automobile 100 % autonome.

N’occultons pas non plus les conséquences sociales qu’aurait la diminution radicale des véhicules en circulation : adieu emplois directs et indirects du transport ! Les emplois évolueront probablement mais il faudrait bien penser les reconversions pour les chauffeurs, mécaniciens, dépanneurs, assureurs et autres métiers touchés par ce qu’on appelle la quatrième révolution industrielle.

Enfin, outre les questions économiques et sociales, se pose la question de la sécurité. Elle serait garantie uniquement si 100% du parc automobile était autonome. Mais encore, quelle confiance pourrait avoir un citoyen dans ces véhicules, ne sachant qui du piéton ou de lui-même le véhicule sauvera en cas d’impact ? Sans compter sur les risques potentiels d’hacking et de détournement de ces véhicules.

Une chose est sûre, l’arrivée des véhicules autonomes est imminente, des expérimentations sont déjà en cours à échelle mondiale. Sur notre territoire, Rennes a lancé une navette autonome, sans chauffeur, sur le campus de Beaulieu en novembre 2018. Nous ne sommes plus qu’à un ticket de bus du futur !

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[1] https://www.debatcitoyen.fr/les-8-choses-a-savoir-sur-les-vehicules-sans-conducteur-autonome/
[2] https://www.debatcitoyen.fr/quatre-scenarios-pour-une-revolution-vehicule-autonome/
[3] https://www.ouishare.net/article/des-vehicules-autonomes-pour-des-villes-durables-entretien-avec-robin-chase
[4] Vous aimez les projections dans le futur ? En voici une autre : https://www.debatcitoyen.fr/une-journee-a-bord-dun-vehicule-autonome-sans-conducteur/
[5] https://www.ouishare.net/article/vous-aussi-passez-au-transport-de-demain?locale=en_us

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