Flex-office
Révolution ou détérioration de la qualité de vie au travail ?

Avec Anne Laure Gahinet nous avons décidé depuis quelques mois de tester le Flex Office. Concrètement notre bureau est dans notre sac, et nous choisissons où nous voulons  travailler : à La Colloc dans l’espace de coworking, dans une salle de réunion ou dans le bureau avec l’équipe, ou en télétravail depuis d’autres espaces de coworking dans d’autres villes. Ce fonctionnement nous a obligées à modifier complètement nos manières de travailler. Aujourd’hui, je me sens « libre », plus productive, plus organisée, je prends du recul, j’ai plus de temps pour lire et écrire 🙂 

Toutefois, si ce fonctionnement nous convient , ce n’est pas le cas pour tous et j’ai eu envie de vous parler de cette nouvelle manière de travailler qui se développe de plus en plus dans les entreprises et qui suscite aussi pas mal de controverses. Reprenons du début :

Qu’est ce que le flex-office ? 

Le principe est simple : les salariés n’ont plus de poste de travail fixe attitré. Ils choisissent en fonction de leur mission l’espace le plus adapté : bureau, open-space, salle de réunion ou bien même canapé du salon (home office).  Les espaces de travail sont pensés en fonction des usages  et non plus selon la logique traditionnelle : un salarié – un bureau.

“14% des actifs français sont concernés par le flex-office parmi eux 22% se déclarent insatisfaits de la qualité de vie au travail (contre 3% en moyenne chez ceux qui ont un bureau)” Source : Actineo / SocioVision / Management Novembre 2019 – N°279

Pourquoi le flex-office ?

Ce concept, résolument tourné vers le collaboratif, prône la mutualisation des espaces et équipements. En effet, le taux d’occupation des bureau ne dépasse pas 30% et le flex-office apparaît comme une solution pour réduire les surfaces de bureau et donc réduire les coûts.

Mais le flex-office n’est pas qu’une manière de faire des économies, c’est avant tout une nouvelle façon de manager, de responsabiliser les salariés, de leur faire confiance. Si vous le mettez en place avec l’objectif de faire des économies, vous ne le faites pas pour les bonnes raisons, au contraire. Le flex-office doit être envisagé dans un contexte où l’entreprise souhaite expérimenter de nouvelles manières de travailler qui replacent l’humain au coeur de leurs préoccupations. L’économie financière réalisée sur les mètres carrés de bureau économisés est l’un des résultats, mais ne doit pas être le moteur de l’action. Auquel cas, cela risque de vous coûter bien plus cher suite à la dégradation de la qualité de vie au travail dans votre entreprise.

Quels impacts sur la qualité de vie au travail ?

Le flex office est un concept qui séduit de plus en plus d’entreprises pour plusieurs raisons :

  • Créativité renforcée : la mobilité induite par le fait de choisir l’espace de travail le plus adapté à sa mission / tâche, stimule la créativité, qui elle-même, est favorisée par les échanges facilités par la mobilité.
  • Liberté et autonomie dans son travail : plus personne ne vous épie, vous êtes responsable de votre mission et de votre organisation.
  • Relations professionnelles simplifiées : étant nomade, les rencontres avec des personnes différentes sont plus fréquentes et cela permet de renforcer la connaissance des autres personnes, dans d’autres services d’une même entreprise.

Toutefois, il est important de préciser que le flex-office n’est pas adapté à tous les postes, ni à toutes les missions. Ce fonctionnement présente des limites et risques sur la qualité de vie au travail. :

  • Absence d’appropriation de l’espace par les salariés :  le flex-office peut engendrer une “perte de son espace à soi”. Les bureaux n’étant plus attitrés, les salariés n’ont plus d’espace qu’ils peuvent personnaliser et donc perdent le sentiment d’appartenance à l’entreprise. “Je n’ai plus ma place” : un sentiment qui peut être dévastateur aussi bien pour le salarié que pour l’entreprise car il entraîne une distance et une démotivation des équipes.
  • Communication détériorée : le nomadisme peut engendrer une augmentation des mails, une mauvaise qualité de la communication et une difficulté à garder le contact.

Préparer cette nouvelle organisation 

Bien-sûr, ce n’est pas parce qu’il existe des limites que le flex-office est à bannir. En effet, cette nouvelle organisation révolutionne le monde du travail, casse les codes et a des impacts qu’il faut bien avoir en tête afin de remplir l’objectif premier qui doit être : améliorer la qualité de vie au travail ! Pour assurer les meilleures chances de réussite, voici quelques conseils :

  • Un management repensé et basé sur la confiance

C’est le point de départ incontournable. Le flex-office est une révolution dans les manières de travailler, mais sans réel accompagnement au changement et volonté des managers, cela peut s’avérer un fiasco. Le manager doit accepter de perdre (ce qu’il pense être) le contrôle. En effet, il n’aura plus de surveillance directe de ses équipes. Les salariés sont responsabilisés. On s’attaque là à un  principe très ancré dans la culture du monde de l’entreprise française : le présentéisme !
Ce mode de travail implique nécessairement de changer le type de management et de faire confiance. Les salariés étant responsables. Le rôle du manager évolue et va se recentrer sur la conservation du lien entre les équipes et le renforcement de la culture d’entreprise. Les processus instaurés par les services de Ressources humaines doivent également coller à  cette nouvelle organisation et ne surtout pas être des freins. Par exemple, les demandes de télétravail ne doivent pas nécessiter d’avoir l’autorisation de deux supérieurs hiérarchiques. Les process doivent incarner les valeurs portées par l’entreprise.

  • Des outils au service de la mobilité

Le flex-office nécessite d’être accompagné d’outils et méthodes qui soient en adéquation avec cette organisation. Une plateforme informatique permet de faciliter les échanges entre les salariés, le partage de l’information, le travail nomade. Cet outil informatique peut également servir à réserver des places afin de limiter la crainte de “ je n’ai pas de place”. Les espaces de travail jouent également un rôle important. Ils sont la concrétisation de ce nouveau management. Des espaces pensés “usages” qui respectent la confidentialité, permettent différentes configurations de travail et une place pour tous ! Ils doivent anticiper sur les menaces de dépersonnalisation des espaces, et c’est là qu’il faut redoubler d’imagination  !

  • Soyez super-organisés !

Le fait de ne pas savoir où vous allez travailler peut être déstabilisant pour vous et pour les personnes avec qui vous travaillez. Instaurez un jour par semaine où vous travaillez chez vous, ou inversement. Cela rassure tout en maintenant un degré de liberté fort.

Vous l’aurez compris, le flex office ça ne s’improvise pas et surtout chaque organisation doit bien penser ses outils et espaces, en les co-construisant avec ses équipes, afin de limiter les sentiments de mal-être, et veiller à former chaque collaborateur à ce nouveau fonctionnement. Comme tout changement, il faut l’accompagner, tester, mesurer, communiquer, ajuster.