Traduction sur grand écran
Lalinea, création de sous-titres pour les festivals

Sans traduction, un film n’a pas de vie possible à l’étranger. Cela paraît évident et pourtant, il faut avoir été confronté au problème pour le réaliser vraiment. Nombre de longs-métrages ne dépassent pas les frontières de leur pays pour cette simple raison. Or, sous-titrer un film n’est pas une mince affaire. Gaedig, créatrice de l’association de sous-titrage Lalinea basée à Lorient, nous raconte comment elle a eu l’idée de mettre ses talents au service de festivals de films internationaux.

Le cinéma a toujours fasciné Gaedig Bonabesse, qu’il soit diffusé dans l’intimité d’une salle obscure ou projeté sur une toile tendue, lors d’un festival d’été. Ces dernières années, elle s’est particulièrement rapprochée du Festival des 3 continents, qui a lieu tous les ans en novembre à Nantes. Parce qu’elle parle couramment anglais et espagnol, elle a pu intégrer l’équipe de sous-titrage et traduction de l’évènement, qui diffuse des films venus d’Afrique, Amérique Latine et d’Asie.

Transmettre le sens

C’est en retranscrivant ces récits venus du bout du monde qu’elle a réalisé : le sous-titrage est un élément clé de transmission et de partage. Parce qu’il permet à chacun de comprendre une histoire, qu’elle soit racontée en mandarin ou en bambara, et de se l’approprier. C’est ainsi qu’est née l’idée d’une prestation de sous-titres dédiée aux festivals. Animée par cette envie, Gaedig suit une formation de sous-titrage, pour apprendre à maîtriser les contraintes techniques de temps de lecture, de pause, de rapidité de parole, de fluidité de lecture. Le sous-titrage, contrairement à la traduction orale, doit tenir compte des images. Il est souvent plus synthétique que mot à mot et privilégie le sens, afin de permettre au spectateur de se concentrer sur l’image.

C’est un travail exigeant et minutieux, qui nécessite des compétences techniques, en plus de la connaissance de la langue. « J’adore les festivals de cinéma, comme le Festival du Film Insulaire de Groix (FIFIG) ou celui de Douarnenez. Je trouve qu’ils font un travail de programmation formidable, ils passent leur année à sélectionner les meilleurs films, pour pouvoir les ramener ici, devant un public français. Malheureusement, pour des raisons d’économie de budget, ils confient souvent la traduction à des bénévoles, qui malgré leur bonne volonté n’ont pas toujours les compétences techniques. Je trouve cela vraiment dommage. »

Soutenir les festivals de cinéma

Gaedif crée son association, Lalinea – en référence au petit personnage d’animation italien, qui ronchonne sans que l’on comprenne un traître mot – au mois de juin 2018. Sa connaissance du monde du spectacle – elle est administratrice pour des compagnies de théâtre depuis une dizaine d’années –  la pousse à se lancer. Elle a déjà le réseau et connaît les contraintes de chacun. « Dans un festival de cinéma, il y a trois métiers qui interagissent : le programmateur, le technicien et le traducteur, chacun avec ses contraintes et ses priorités. J’essaie de m’adapter à tous. » Afin de proposer ses prestations de sous-titrage aux festivals de cinéma, elle opte pour le statut associatif avec l’espoir d’obtenir des subventions et de permettre ainsi à des petites structures de s’offrir ses services. Le FIFIG 2018 lui confie ainsi l’encadrement technique de ses bénévoles-traducteurs. Tout au long de l’été, elle suit les lignes de mots, minute chaque dialogue, vérifie la cohérence image/texte.

Cette première expérience déclenche d’autres propositions. De quoi la convaincre qu’elle tient une bonne idée. A terme, Gaedig souhaite constituer un fichier de traducteurs bénévoles et professionnels, qu’elle pourrait ainsi proposer aux festivals. L’idée pour elle, serait de pouvoir vivre pleinement de cette activité d’ici quelques années. Elle envisage aussi de mettre en place des prestations de sur-titrage, pour le théâtre et l’opéra, qui exigent d’autres contraintes techniques, comme celles du direct.

Une région de festivals

Parler avec Gaedig, c’est aussi l’occasion de faire un tour d’horizon de ce qui se fait en matière de cinéma en Bretagne. Elle travaille actuellement à la traduction d’un film australien, One Shot, pour le festival Surf & Skate qui aura lieu à l’Estran de Guidel – 56 (lestran.net/surfskate/festival18/) fin septembre. Puis, viendra le temps du Festival des 3 continents, en novembre, pour qui elle coiffera les casquettes de traductrice, adaptatrice et projectionniste. Parmi les projets à venir, l’association J’ai vu un documentaire, située à Lorient – 56 lui a  également commandé les sous-titres d’un film africain, tandis que le festival Passeurs de Lumières (Bannalec – 29) travaille avec elle à la création d’ateliers de sous-titres à destination de lycéens. Et parce qu’elle est super active, Gaedig aimerait aussi se rapprocher du Festival du Film britannique de Dinard (35), qu’elle admire depuis très longtemps. « Pour le moment, les gens viennent à moi sans que j’aie besoin de communiquer. C’est ce qui me fait penser qu’il y a un réel besoin à combler. »

  • Pour en savoir plus, n’hésitez pas à contacter Gaedig par mail : gaedig@gmail.com

* Une collaboration made in La Perrière

Voilà une histoire comme on les aime à La Colloc. Pierre Marcel, réalisateur et créateur des Projections Salées, prépare la programmation d’une série de cinq documentaires sur la mer réalisés par Jean-François Pahun entre 1989 et 2009. Afin de les diffuser au plus grand nombre, il prévoit des sous-titres en anglais, qu’il commande à Kévin Martin, traducteur chevronné. Mais, il manque à Kévin les notions techniques pour intégrer les sous-titres. Il se tourne alors vers … Gaedig. Et le projet prend forme, localement, et en quelques allers-retours entre étages. Ou comment opère la magie du tiers-lieu…